4. Les Autochtones dans le Québec de l’après-guerre

4.2. L’État canadien dans l’Arctique et le déplacement des populations inuites

 Comprendre les causes et les conséquences de la présence canadienne dans l’Arctique et du déplacement des populations inuites.

Dans le contexte de la guerre froide, les États-Unis et l'Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) accentuent leur présence militaire dans l’Arctique, une région convoitée pour son positionnement stratégique ainsi que ses ressources énergétiques et minières. La présence militaire américaine dans le Nord canadien préoccupe le gouvernement fédéral, qui mobilise les forces armées canadiennes pour affirmer sa souveraineté dans l’Arctique.

Portrait cartographique
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Source : Service national du RÉCIT, domaine de l’univers social

Dans les années 1950, les armées américaines et canadiennes collaborent pour construire des stations météorologiques et des aéroports militaires ainsi qu’un système de détection des missiles intercontinentaux. Ces infrastructures militaires accroissent les contacts entre les populations inuites, les forces armées canadiennes et les fonctionnaires du gouvernement fédéral.

Pour affirmer sa souveraineté dans l’Extrême-Arctique, le gouvernement canadien déplace plusieurs familles d’Inukjuak (Port Harrison) et de Mittimatalik (Pond Inlet) vers les îles d’Ellesmere et de Cornwallis. Entre 1953 et 1955, ce gouvernement relocalise 87 Inuits à des milliers de kilomètres de leurs villages d’origine en leur promettant de meilleures conditions de vie et la possibilité de retrouver leur terre natale après deux années de participation au projet.

Description
Source : Auteur inconnu, Famille inuite (exilés du Haut-Arctique) à bord du C.G.S. C.D. HOWE à Grise Fiord/Qikiqtaaluk (1958), Bibliothèque et Archives Canada, Fonds du ministère de la Santé du Canada, MIKAN 3198713. Licence : Image utilisée avec la permission de Bibliothèque et Archives Canada, tous droits réservés.

La délocalisation des Inuits engendre des conséquences psychologiques et physiques pour les familles déplacées, qui subissent les conditions de vie difficiles de l’Extrême-Arctique. En plus d’affronter l’obscurité en hiver et les sols gelés en été, les familles déplacées composent avec la rareté du gibier et les limites de chasse imposées par le gouvernement canadien. Lorsque les familles demandent aux fonctionnaires fédéraux de retrouver leurs communautés d’origine, ces derniers refusent de financer le voyage de retour, ce qui entretient l’isolement des Inuits pendant plusieurs années.

Les politiques fédérales bouleversent le mode de vie semi-nomade des populations inuites. Par conséquent, de plus en plus d’Inuits s’établissent dans des villages permanents où abondent désormais leurs chiens. Nommés qimmiit en Inuktitut, ces chiens s’adaptent difficilement à la vie sédentaire au sein des villages, ce qui suscite des tensions avec les autorités gouvernementales.

Description
Source : Malcolm Ritchie, Expédition de Jacques Rousseau dans la baie d'Ungava - entes [inuite], avec chiens husky (1951), Bibliothèque et Archives nationales du Québec, E6,S7,SS1,P88602. Licence : Creative Commons (BY-NC-ND).
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Source : Antoine Désilets, Fort Chimo/Kuujjuaq (entre 1960 et 1970), Bibliothèque et Archives nationales du Québec, P697,S1,SS1,SSS8,D9. Licence : Creative Commons (BY-NC-ND). 

Dans les années 1950 et 1960, les policiers de la Gendarmerie royale du Canada et de la Sûreté du Québec abattent des milliers de chiens sous prétexte qu’ils menacent la sécurité et la santé des Inuits. L’abattage de ces chiens entrave le déplacement des populations inuites et limite la pratique de la chasse, ce qui provoque une insécurité alimentaire dans plusieurs villages du Nunavut et Nunavik.


 Cahier de traces